Les 7 Majeurs avec Scapada
Scapada au sommet des Alpes
Mais c’est quoi, au juste, les 7 Majeurs ? Rien de moins que sept cols hors catégorie, tous perchés à plus de 2000 mètres dans les Alpes du Sud, entre la France et l’Italie. Notre aventure, dans l’ordre : Bonette (2715 m), Vars (2108 m), Izoard (2360 m), Agnel (2744 m), Sampeyre (2284 m), Fauniera (2481 m), et Lombarde (2350 m). Alors que certains tentent de réaliser ce périple en 24 heures, pour nous, ce sera sur trois jours. Suffisamment long pour en profiter pleinement et avoir des journées bien chargées.
Jour 1 : Bonette (2715 m) + Vars (2108 m)
145 km, 3850 D+
Départ frais depuis Isola pour attaquer directement la Bonette, le plus haut col routier d’Europe. Rien de mieux pour donner le ton. À 9h, on rejoint la route qui mène à Saint-Étienne-de-Tinée, au pied du col. Encore légers dans cette première montée, on croise Roger, un local qui, par beau temps, s'offre la Bonette une fois par semaine. À mi-parcours, on décide de faire une pause dans un refuge pour savourer un café et une énorme part de gâteau, histoire de se rappeler que, finalement, on est aussi en vacances.
Une fois rassasiés, on repart et dépasse quelques cyclistes que nous avions vus pendant notre pause. Le sommet approche, et la vue est à couper le souffle. C’est toujours un choc de se retrouver au sommet de la Bonette, entouré de ces montagnes immenses. Photo souvenir, quelques échanges avec d’autres cyclistes, puis on file dans la descente, les yeux remplis de lacs, de rivières et de cascades. Et là, deux bikepackers nous crient un "Massacan, Massacan" ! Autant dire que ça met la pêche.
À la fin de la descente, arrêt au snack local avant d'attaquer Vars. Un croque-madame pour moi, sandwich américain pour Matt. Deux grenadines et quatre cafés plus tard, c’est reparti pour grimper en pleine digestion, pas l’idée la plus brillante. Vars se révèle moins attrayant visuellement, mais toujours aussi épuisant. Au sommet, on s’effondre dans un bar à l'ancienne, l’Igloo Varsin, et partageons quelques verres avec des cyclistes qui terminent leur traversée de la France.
Après une descente rapide, nous arrivons à Briançon, mais ma réservation pour la nuit est à Puy-Saint-Pierre… 500 mètres de dénivelé supplémentaires. Heureusement, l’accueil chaleureux de Catherine et un repas généreux nous attendent.
Jour 2 : Izoard (2360 m) + Agnello (2744 m) + Sampeyre (2284 m)
128 km, 4010 D+
On se lève avec les jambes bien lourdes, comme si chaque geste pesait une tonne. Même tenue qu’hier, on se traîne jusqu’à Briançon pour un petit-déjeuner à la boulangerie, viennoiseries, sandwichs et pizzas, nos fidèles alliés. Il est à peine 9h quand on entame l’ascension de l’Izoard. Certains descendent déjà à toute allure, et un groupe en longboard traverse la route, les yeux rivés sur le bitume, à fond dans la pente. La montée est longue, et je ne suis pas en grande forme. Premier café au bord de la route, histoire de ne pas se laisser trop distraire, car ce col est magique, surtout vu de l’autre versant.
La descente, elle, est irrégulière et presque vertigineuse, mais quelle beauté ! Ensuite, c’est direction le col d’Agnel. On sait d’avance que ça va être long, mais heureusement moins raide que du côté italien. La route est splendide, mais les motos gâchent un peu l’ambiance. J’adore partager la route, mais ici, on n’a pas tous la même perspective sur l’ascension. En haut, c’est la cohue entre voitures, motos et cyclistes. Une petite mamie vend des boissons, des sucreries, et même du café. L’Italie nous accueille avec son fameux brouhaha.
Dans la descente, on croise Paula, la marmotte. Oui, celle-là même que nous avions vue il y a deux ans. On s’arrête, presque émus de retrouver ce petit bout de nature si familier. Puis, direction Pontechianale pour une glace. L’envie de goûter tous les parfums nous tente, mais il reste un gros morceau à avaler : le col de Sampeyre.
Il est 15h, et le soleil de juillet est bien installé. La route est étroite, cabossée, un vrai paradis pour nous. La végétation est dense et l’air est lourd. Le pourcentage reste sous les 10 %, mais l’Italie commence ici, avec ses routes isolées et sauvages. À 5 km du sommet, petite pause : on engloutit ce qu’il nous reste, notamment une part de pizza, tout en gardant précieusement un pain au chocolat pour le sommet. Là-haut, à peine quelques vans et randonneurs ; c’est calme, presque désert. Un col sauvage et paisible, loin de l’agitation, juste comme on l’aime. Le soleil se couche doucement, et on entame la descente vers la vallée de la Maira. Ce moment où la lumière change et où tout semble plus doux.
Jour 3 : Fauniera (2511 m) + Lombarda (2350 m)
106 km, 3190 D+
Dernier jour. On est excités mais tristes de voir cette aventure toucher à sa fin. On aimerait bien rester un jour de plus à flirter avec les sommets, à rouler sur ces petites routes italiennes. Elles nous séduisent avec leurs pourcentages raides, leurs virages serrés, leurs rivières fraîches où l’on trempe nos pieds fatigués. Et puis il y a les marmottes qui sifflent, rappelant qu’on est haut, vraiment haut. Les refuges sont chaleureux eux aussi et gourmands, les villages pleins de vie, une vieille France disparue qu’on retrouve de l’autre côté de la frontière.
Ce matin, l’excitation est à son comble. Le Fauniera nous attend, un col mythique. Nous l’avions déjà frôlé lors d’un périple en gravel vers la Gardetta. Aujourd’hui, on pénètre dans la vallée de la Maira, encore plus sauvage qu’on ne s’en souvenait. Sur la route, on croise quelques vaches et brebis ; la montée est douce, presque amicale, jusqu’aux derniers kilomètres, où la pente se fait plus raide. On distingue enfin le sommet. Le col de Pantani ! Le dernier virage est émouvant. On est au bout du monde, la route se transforme en piste, et on roule quelques centaines de mètres sur les graviers avant de retrouver le bitume. On traverse ce décor grandiose, bouleversés par la beauté du paysage qui nous entoure (larmichettes de joie).
Seuls au monde sur cette petite route qui serpente, on est cernés par les montagnes. La vue à 360 degrés nous coupe le souffle. Puis viennent les pâturages, quelques fermes, et ce refuge où nous nous étions abrités de la pluie la dernière fois. Aujourd’hui, on profite de la terrasse, les pieds dans l’herbe. Matt savoure une polenta, moi des pâtes fraîches. Un dernier EstaThé pour couronner le tout. C’est le paradis, vraiment.
Pour terminer cette aventure, il reste la Lombarde. Plus de 20 km à une moyenne de 7 %. On monte doucement, la fatigue se fait sentir, mais on tient bon. À mi-chemin, on tombe sur une rivière : impossible de résister. On sort quelques biscuits salés et des bonbons, on s’asperge d’eau fraîche et on se repose quelques minutes sur les rochers.
En remontant en selle, c’est comme si on avait gagné des points de vie pour affronter les derniers kilomètres. Le sommet approche, et on est prêts à bousculer le dernier col de ce périple inoubliable...